CLOWN ACCORDEONISTE

Henry d’Anty (1910-1998) : un expressionniste d’une sensibilité tranquille

Alternant souvent ses lieux de résidence et de création, Henry D’Anty n’en reste pas moins le digne représentant de la peinture montmartroise et par là-même d’un expressionnisme auquel il consacra le meilleur de son art dès le milieu du siècle précédent, et tout au long duquel il charma amateurs et collectionneurs de sa manière généreuse et authentique. 

En effet, comment ne pas succomber à la densité expressive d'une peinture faite de mouvement, de pittoresque, de poésie, tantôt illustrant un épisode, un souvenir, tantôt s'attachant à décrire le mystère des âmes, des êtres, des paysages, de la vie-même capturée en énergie et en suggestion.

Ce n'est pas par hasard que les "artistes-peintres témoins de leur temps" l'accueillirent parmi eux lors de mémorables salons. d'Anty n'a cessé d'affirmer qu'il existe, qu'il crée, qu'il aime, en parisien natif de Belleville, en homme de goût et en humaniste. Travailleur acharné, chercheur obstiné, il exposa avec ses amis Gen Paul, Foujita, Chagall, J. Dufy ou A. Hambourg sans pour cela succomber aux facilités des écoles, des penchants ou mêmes des clans, en visionnaire d'une peinture humaine, d'une sensibilité tranquille sous le coup de pinceau ombrageux et âpre et d'énergiques et pleins coloris, aux rouges audacieux, aux contrastes volontaires qui activent la plénitude de la matière fruste et la noblesse de l'esprit.

Séduire par d'admirables portraits faits de rouge écarlate, captiver grâce aux plans incisifs d'un paysage neigeux, d'un “Moulin Rouge” agressif, d'anecdotes humaines ou clownesques, montrent bien le niveau magique et évocateur auquel aboutit son oeuvre. Regardez ses compositions florales: l'étrange beauté de la mise en page y fait voir d'étonnants accords de tendresse et d'éclat, et les illustrations au sujet de “Don Quichotte" brillent de mouvement, de lumière et de vitalité dans un essentiel remarquable, d'une pérennité virile et indéniable, loin du mysticisme ou du caricatural, mais toujours d'un contact privilégié envers le motif, saisi par la richesse d'un exceptionnel brio.

A. Ruellan