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A Washington la National Gallery

A Washington la National Gallery

L a National Gallery of Art est fascinante. Son directeur l'explique ici lui-même : "parce que la politique des grands mécènes américains et celle de l'administration fédérale ont acquis aux Etats Unis la possession de trésors incomparables venus des collections européennes et soviétiques. L'histoire de cette galerie illustre l'aspect le plus éclatant de l'efficacité d'outre-Atlantique : quand l'esprit de performance s'allie au goût le plus sûr...".

Le plus grand bâtiment de marbre du monde

La national Gallery de Londres a servi de modèle au musée de Washington.

Après cinq ans de travaux effectués avec une rapidité vertigineuse, le plus grand bâtiment de marbre du monde allait ouvrir ses portes en 1941 à l'emplacement choisi sur le Mall (entrée principale). La National Gallery of Art s'étend sur 110 000 m² et abrite aujourd'hui plus de quarante mille oeuvres. C'est le plus jeune des grands musées du monde et pourtant le plus spectaculaire.

Le centre du monument est une vaste rotonde, inspi rée du panthéon de Rome, qui est soutenue par vingt-quatre colonnes d'ordre ionique d'une hauteur de onze mètres. Au milieu de la rotonde, domine le dieu Mercure de Jean de Bologne (hommage rendu au Dieu du Commerce qui avait permis un tel rassemblement de richesse). Deux jardins intérieurs sont reliés à la rotonde par des galeries où sont placées des sculptures. Des parterres de fleurs y sont exposés. Les plus belles salles de peintures sont groupées autour de ces jardins.

La galerie possédait cent quinze peintures lorsqu'elle fut inaugurée. Suite aux importantes donations, le bâtiment principal devint trop exigu. La National Gallery s'est donc étendue, Washington n'a pas eu peur d'une approche plus moderne, futuriste. Si sa forme pyramidale est familière et rappel le un parc à sculptures, c'est que l'architecte de la nouvelle aile - aile orientale - est monsieur Pei: "ce bâtiment n'est pas un monument, mais un endroit pour attirer le public, pas pour l'intimider mais pour l'inciter à s'attarder. Ce doit être un bâtiment agréable à l'usager. Il faut le concevoir de telle manière que les jeunes soient intéressés, sinon l'objectif est raté, ils y passent cinq minutes puis vont au musée de l'Air voir la fusée lunaire. C'est ça le problème, penser en fonction de ce public-là". Ce nouvel édifice est en soi une oeuvre d'art - coût de l'opération : 700 000 000 de francs, pour une réussi te exemplaire : clarté, fraîcheur, quiétude, il y a accord parfait entre le beau et l'utile.

La National Gallery of Art de Washington est avant tout un musée de peintures : 70 % de ses magnifiques collections sont les dons de quatre grands mécènes Mellon, Widener, Kress et Chester Dale qui en fait un établissement unique au monde. Le musée n'a acheté que cinquante tableaux depuis son inauguration ! Le mécénat fait le reste...

Un vrai conte de fées

Il était une fois... en 1834, l'arrivée d'un fabuleux navire venant d'Angleterre, chargé de 508 318,46 dollars en souverains d'or ! C'était le legs d'un chimiste et géologue anglais qui n'aurait jamais mis les pieds en Amérique - pour "l'accroissement et la diffusion de la culture parmi les hommes" - James Smithson, fils naturel du duc de Northumberland, s'était vu frustré de son rang par l'illégitimité de sa naissance. Il traduisit son amertume envers l'Angleterre en faisant don de sa fortune colossale à un pays à l'absence de la "méprisable hypothèque royale" donnait "à chaque homme la chance qu'il mérite".

C'est ainsi qu'en 1835, le Président Jackson annonçait qu'un anglais inconnu venait de léguer sa fortune aux Etats-Unis. Le congrès créait quelques années plus tard, la Smithsonian Institution, ancêtre de la National Gallery.

Washington voulait avoir son grand musée qui serait une reconstitution de l'Acropole où le Parthenon serait une fois et demi plus grand. Mais à l'intérieur seraient exposées les copies des plus beaux tableaux du monde! l'Amérique se contenterait de reproductions puisque les originaux appartenaient à l'Europe. C'est alors qu'Andrew Mellon décide d'intervenir.

L'héritage des tsars

Après avoir été le ministre des finances dans les gouvernements Harding et Coolidge, Andrew Mellon se consacra exclusivement à sa passion : collectionner les tableaux. Sa plus belle réussite fut l'achat en 1931 de trente et une toiles du musée de l'Ermitage de Leningrad.

Tout commença avec le rapprochement de l'Union Soviétique avec le magnat du pétrole, Calouste Gulbenkian, qui était un collectionneur acharné et sans scrupule.

L'URSS avait besoin de devises étrangères

Les soviétiques exportèrent leur pétrole via Gulbenkian qui exigea une compensation. Ce der nier demanda donc l'autorisation d'acheter des oeuvres d'art de l'Ermitage, mais devant le prix exigé pour les oeuvres exceptionnelles, Gulbenkian renâcla. Mellon lui n'hésita pas.

Ainsi Mellon acquit deux Raphaël "Saint Georges et le Dragon", "La Madone d'Albe", un Botticelli

"l'Adoration des Mages"; un Titien “La Vénus au miroir"; un Véronèse "Moïse sauvé des eaux"; un Van Eyck "l'Annonciation"..

La transaction fait du bruit : si Mellon est le grand négociateur avec son marchand Knoedler, il ne faut pas oublier son "homme de poigne" dans ses affaires : Joe Duveen. Ce dernier réussit à échanger avec l'Allemagne quelques toiles anonymes mais allemandes chères à Hitler contre de superbes toiles de l'école italienne : un Duccis, un Filipo Lippi, un Raphaël provenant du Kaiser Freidrich Museum de Berlin et de la Pinacothèque de Munich.

La peinture européenne triomphe à Washington

C'est surtout grâce à Mellon si l'école italienne est bien représentée à la National Gallery de Washington on peut y admirer les toiles de Botticelli, le Perugin, Raphaël, Titien, Véronèse et même un Léonard de Vinci! Tous les tableaux de Léonard de Vinci appartenaient à des musées ou églises, sauf un: le célèbre "portrait de Ginevra Benci" qui faisait parti de la collection des Princes de Liechtenstein. Le musée obtint que le tableau lui soit prêté temporairement. Puis en 1967, la célèbre toile fut achetée six millions de dollars par la National Gallery.

Le deuxième grand donateur fut Samuel Kress, qui devait sa fortune à une chaîne de magasins. Ils possédaient quelques toiles de premier ordre : "Le portrait d'un Condottière" de Giovanni Bellini"; "Bindo Altoviti" de Raphaël; une "vue de campo San Zanipolo" de Guardi. Et un petit paysage italien du XVIIe siècle dont il était très fier. Ensuite Kress acheta à Duveen des toiles de Bosch "Allégorie de la Misère et de la Mort" un Brueghel le Vieux "la tentation de Saint Antoine"; un Dürer "Vierge à l'enfant". La collection devenait intéressante auprès des amateurs. Le directeur de la National Gallery réussit à convaincre Kress de faire don des oeuvres importantes de sa collection au musée en échange d'un brin d'immortalité. Le milliardaire légua aussi au musée une considérable somme d'argent. Après sa mort, la Fondation Kress dépensa de 1945 à 1955 plus de vingt cinq millions de dollars pour les oeuvres d'art : jamais un musée n'avait eu la chance de disposer d'une telle somme pour ses achats.

Joseph Widener est le troisième grand donateur du musée, milliardaire et passionné par l'art comme les autres.

En 1921, Widener apprend que le Prince Youssoupoff avait fui son pays après la révolution russe et qu'il acceptait de vendre ses deux toiles de Rembrandt "Portrait de femme à l'éventail" et le "Gentilhomme en chapeau". Widener sauta sur l'occasion et acheta les deux toiles contre un chèque de vingt millions de francs. En 1949, la collection de Widener qui comptait : une série de Rembrandt, des Van Dyck, Turner, et aussi des Renoir, Degas, Manet dont le surprenant "Torero mort" achetés à une époque où la France méprisait encore les impressionnistes.

La peinture européenne triomphe à la National Gallery de Washington. Les points forts de la collection sont la Renaissance italienne avec un Bronzino comme référence "Portrait de femme avec son fils"; le XVIIe siècle flamand et hollandais et le XVIIIe siècle anglais.

Le quatrième grand enrichissement date de 1955. Le financier Chester Dale jeta son dévolu sur les oeuvres d'art en se spécialisant dans les périodes impressionnistes et post impressionnistes: "Quatre danseuses" de Degas, "Fillette à l'arrosoir" de Renoir, "Vase de Fleurs" de Cézanne, "La Mousmée" de Van Gogh.

En 1972, les Picasso et les Cézanne d'Averell Harriman sont légués au musée.

Aujourd'hui, l'extension du musée dépend toujours de particuliers qui lui donnent de plus petits ensembles ou même un seul tableau.

Le système fiscal américain incite les collectionneurs à faire don au musée de leurs chefs d'oeuvre car les dons en oeuvres d'art sont "tax deductibles". Une loi qui profite bien aux musées américains !

Jean DELAUNEY


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