Pierre Grisot, peintre de la femme mais aussi paysagiste d'atmosphère...

Pierre Grisot, peintre de la femme mais aussi paysagiste d'atmosphère...

Il est frappant de voir que Grisot ne s'intéresse pas particulièrement à l'illustration fidèle de personnes concrètes. Son intérêt s'est toujours porté vers leur réalisation formelle particulière et leur évolution.

La divergence entre l'espace et la surface, l'ornement et l'incarnat de la peau, l'opposition du lointain et de la proximité sont des thèmes qui reviennent sans cesse dans les toiles de Grisot.

Le peintre dématérialise la substance du corps et la dissout dans un jeu de mouvement décoratif. En même temps, l'artiste donne du poids et une fonction sensuelle aux objets décoratifs.

C'est de cette manière qu'il réussit à préserver ses

figures d'une possibilité de définition exacte.

Grâce à l'opposition flagrante des éléments naturalistes et de surfaces décoratives, le geste et la physionomie sont mis en valeur.

Ses jeunes femmes sont comme les formes définitives du romantisme. Ce sont des créatures fragiles, comme les poètes en ont déjà rêvé, princesses de mondes meilleurs et plus tendres.

Leurs visages semblent nous dire : nous resterons ainsi éternellement. Nous sommes nées pour l'enthousiasme des peintres et des poètes. La femme rayonne dans l'oeuvre de Grisot et y occupe souvent une place importante. Les peintures de paysages prennent également une grande place dans l'oeuvre du peintre.

Ce sont des peintures d'atmosphère et de contemplation. La plupart se distinguent par la présence de jeunes femmes et leur calme.

Ce calme n'est dérangé par rien. Même la direction de la lumière, souvent diffuse et impressionniste souligne encore la sérénité.

Le raffinement est un caractère constituant des paysages de Grisot. Des arbres se dressent, des rivières évoquent l'éphémère et le charme séduisant des eaux dormantes. De tels décors de mélancolie et de fuite devant le monde procurent un état d'isolement solennel.

De telles toiles permettent de s'immerger dans la contemplation d'une représentation de la nature pleine d'atmosphères colorées.

Point d'éléments dramatiques mais le détail, la direction de la lumière, l'organisation spatiale attirent le spectateur dans le charme d'une atmosphère subtile. Peu à peu, la nostalgie d'une nature "pure" et originelle grandit, une nature qui se renouvelle d'elle même et indéfiniment.

C'est en définitive une nature statique, dans laquelle un changement n'apparaît que très rarement. La passivité de cette nature indépendante de l'homme exige une perception dans laquelle on se tient à dis tance.

Les paysages de Grisot deviennent parfois des motifs de surface décoratifs, incitant le spectateur à rester en dehors de cette mosaïque ornementale impénétrable. Cependant, ce serait commettre une grave injustice que d'occulter la puissance d'évocation de la couleur chez Grisot. Ses aplats de couleurs ont une densité particulière unique. Les jaunes sont chauds, nerveux, les bleus paisibles, les verts ardents, passionnés, virils.

Comme les couleurs, merveilleusement justes, les compositions sont toujours sobres et équilibrées. Oui, la peinture de Grisot est une peinture dont on reparlera !

Thiérry Demaubus.