> Interviews > Hinsberger, peintre de la Comédie Humaine

Interview de Hinsberger

Comment comprendre l'oeuvre d'Hinsberger sans connaître, un tant soit peu, l'homme ? Il nous fallait rencontrer Hinsberger, peintre de la femme, mais aussi peintre de la comédie humaine, pour porter un oeil avisé sur ce qu'il peint et nous immiscer dans les secrets de ses toiles où vibre ce chant plastique à la femme, dans la stylisation de laquelle Hinsberger a atteint des nuances difficilement égalées. D'autant plus que ce peintre qui dit "parler" avec sa toile a atteint une maîtrise de son art qui le place parmi les grands peintres contemporains. Une oeuvre à redécouvrir !

Thierry Demaubus : Comment êtes-vous venu à la peinture ?

Alexis Hinsberger : Par la gravure sur cuivre et sur cristal ! Ce "métier" s'est transmis de génération en génération dans ma famille. Mon père gravait déjà pour le compte d'Alphonse XIII, grand père du roi actuel d'Espagne ! Il m'a transmis le goût du bel ouvrage et la passion du dessin. Très vite, je me suis rendu compte qu'il était nécessaire de maîtriser le dessin autant que la peinture proprement dite et je suis rentré à l'Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Barcelone après avoir été reçu au concours de dessin. J'y suis resté quatre années, pendant lesquelles j'ai appris l'anatomie et la perspective - très présente dans mes tableaux- Evidemment, je possédais un sens inné du dessin, de la ligne juste.

T. Demaubus : Une peinture se caractérise en général par deux éléments : la ligne et la couleur. Dans l'une et l'autre, chaque peintre inscrit depuis toujours, sa singularité. Le rapport de ces deux éléments, allié au choix du sujet, définit l'artiste. Où vous situez-vous ?

A. Hinsberger : Chaque peintre digne de ce nom possède sa singularité propre. Mon travail se distingue sans doute par un grand souci du dessin qui est la " charpente de la couleur". Il ne s'agit pas de faire du dessin coloré mais de modeler la forme par le dessin et la couleur. On a souvent identifié ma peinture à ce côté poignant, presque tragique de la ligne et à l'utilisation du clair-obscur. Mon métier de graveur m'a sans doute aidé dans cette recherche de la profondeur et de la forme sculptée.

T. Demaubus : Effectivement, on a souvent l'impression que la matière picturale a été travaillée de " l'intérieur " par la main de l'artiste comme une sculpture. 

A. Hinsberger : Ma force réside sans doute dans le fait que je ne me laisse jamais emporter par le dessin. La main du peintre doit contrôler son univers imaginaire pour pouvoir mieux le transcrire et le faire apprécier des autres. Je m'efforce systématiquement de libérer la composition des quatre angles du tableau.

T. Demaubus : La femme semble être à la base de toutes nos émotions. Elle apparaît comme le vecteur de votre création. Que représente -t-elle pour vous ? 

A. Hinsberger : Pour moi, la femme est la plus belle création que l'on puisse imaginer. Certes, elle a inspiré tous les peintres... Il y a dans ma peinture un mythe de la femme dévoilée, exposée, belle et vulnérable. C'est elle qui véhicule le mieux le message  émotionnel que je tente de livrer à l'amateur. Pour cela, plus je m'imprègne de mon modèle, mieux je réussis à retrouver le plaisir sensuel du corps féminin à travers le dessin ou la peinture.

T.D : Votre oeuvre - en particulier les nus- rappelle celle du grand peintre cordouan Romero de Torrés, peintre de la chair cuivrée et de l'amour passionné pour la femme espagnole... 

Hinsberger : Oui. Romero de Torrés était un grand artiste qui savait conférer à ses nus un côté dramatique, voire tragique qui n'existe pas en tant que tel dans ma peinture. Il y a une espèce de "gymnastique visuelle" dans ce que je fais : j'observe, je m'imprègne de ce que je vois, puis je m'efforce de retrouver l'essentiel du corps ou plutôt le corps dans son essence. 

Le détail a tendance à figer la peinture alors que le dessin plus libre et plus ample permet d'exalter le mouvement qui est la vie. 

Ainsi en peignant contre l'oubli, le temps qui fuit, l'artiste peint contre la mort. Il n'arrange pas la réalité mais la recompose et la transfigure.

T.D : Quels sont les peintres qui vous ont le plus influencé ? 

Hinsberger : J'ai toujours admiré l'art de Gustave Doré dont les dessins ont trop souvent, et trop longtemps occulté l'oeuvre peinte. Tous ses tableaux sont extraordinaires.  Mes premières influences furent Velasquez, Goya... Mais mon véritable maître spirituel reste Rembrandt.

T.D : Que signifie pour vous la révolution impressionniste ?

Hinsberger : L'Impressionnisme a sans doute permis de mieux traduire les sensations que procurent la contemplation d'un paysage. Il a permis aux peintres amoureux de la nature de mieux l'exprimer plus que de véritablement s'exprimer. Voyez-vous, l'Impressionnisme s'attache d'abord aux impressions visuelles, vibrantes et passagères. Il est vrai que certaines de mes toiles - notamment dans le traitement des visages- marquent une sensibilité proche de l'Impressionnisme. Mais j'appartiens d'abord au XXème siècle, marqué par l'expressionnisme ! 

T.D : Avez-vous l'impression d'avoir atteint votre objectif ? 

Hinsberger : Non. Car la peinture n'est pas une discipline dans laquelle on peut avoir "fini" quelque chose. Le peintre qui croit être arrivé au sommet de son Art, n'atteint en fait que les débuts de sa propre dégénérescence. L'artiste doit être tout entier tendu vers un absolu, vers une vérité, vers sa vérité…

Les toiles sont "cruelles" en ce sens qu'elles vous renvoient à vous-même, à votre lutte acharnée et infinie avec la matière. La peinture, vous savez, peut vite devenir une véritable drogue... Elle laisse toujours des cicatrices. Tel un musicien à l'affût de nouvelles sonorités, je guette constamment le jeu des couleurs et je m'efforce de découvrir de nouvelles "sonorités", de nouvelles "clefs" plastiques…

T.D : Dans l'immédiat, quels sont vos projets ?

Hinsberger : Je viens de réaliser l'illustration de "Carmen" de Prosper Mérimée en quatre tomes. Et je vais très prochainement présider un Salon. Bien que je n'aime guère les Salons car on n'y voit qu'un petit échantillon de l'oeuvre d'un artiste, il faut savoir parfois faire des exceptions, surtout lorsque vous y retrouvez des grands noms de la peinture et amis que vous n'aviez pas revus depuis longtemps...

  T. DEMAUBUS

Alexis HINSBERGER devant son "Théâtre"

Alexis HINSBERGER et Marcel Spilliaert (expert en tableaux modernes) feuilletant un livre d'art sur l'oeuvre peinte du Maître. 


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