Interview de Juan Cook

Juan Cook : liberté de la presse, source de vie

Notre courrier et en particulier notre éditorial publié dans le N° 59 de mai-juin ont déclenché la stupéfaction, des interrogations et de délicates attentions, aussi généreuses les unes que les autres. Elles témoignent ainsi de l'attachement accordé à notre magazine. Parmi toutes celles reçues, il en est une qui nous a profondément touchés. En effet, Juan Cook, artiste chilien qui fut emprisonné dans son pays, s'est immédiatement senti concerné et spontanément nous a offert son aide. De passage dernièrement dans les bureaux de la rédaction, il s'est entretenu avec notre directeur de la publication, Valeurs de l'art et nous vous livrons ici un extrait de ses propos.

Valeurs de l’art: Nos difficultés engendrées par l'administration fiscale ne vous laissent pas dans l'indifférence, n’est ce pas ? 

Juan Cook: Je connais bien les espaces de liberté dont la presse illustre l'une des dimensions. Ce thème récurrent cher à nos démocraties alimente quotidiennement les discours d'orateurs de toutes opinions; souvent contrasté, parfois controversé, il demeure néanmoins le symbole universel capable de réunir tous les suffrages, il peut devenir guerrier quand il s'agit de le défendre. Adoré, bafoué ou revendiqué, on n'en comprend mieux le sens qu'à partir d'expériences parfois douloureuses. je suis né à Santiago du Chili et encore sur les bancs de l'école des Beaux-Arts lorsque éclate le coup d'Etat de 1973. Je décide alors de militer en faveur de la démocratie et de la liberté. Je crois aux valeurs de l'imagination et à l'expression spontanée. Ce militantisme actif me vaut cinq années dans les geôles de Pinochet et je ne dois ma libération qu'à l'intervention de la Croix-Rouge française. Aussi, lorsqu'une voix aussi originale que celle de "Valeurs de l'Art" doit se taire pour un banal problème de taxe, je me refuse à penser que la liberté de publier, autrement dit, de s'exprimer, reste un droit bien fragile. 

Valeurs de l'Art : La situation nous préoccupe d'autant plus que l'existence même de notre revue est menacée. Pour nous aider, vous nous avez soumis une idée, quelle est-elle ?

Juan Cook : Réflexion faite, qu'en France on ne peut pas empêcher un magazine artistique de s'exprimer uniquement pour une question d'interprétation d'une taxe, fut-elle à la valeur ajoutée et ma colère apaisée, je me suis mis à mon chevalet et j'ai exécuté un tableau sur le thème de la liberté de la presse. Je cite plus haut "...je crois en l'expression spontanée et aux valeurs de l'imagination...", et j'ajouterais à l'instinct de la colère. Tous les ingrédients pour que l’oeuvre s'accomplisse étaient réunis. C'est pourquoi, après avoir achevé ce diptyque, je vous ai appelé et j'ai voulu l'offrir, mais, à qui ? Dans un premier temps, j'ai pensé à la rédaction mais je ne souhaite pas limiter la portée de mon action mais bien au contraire, l'élargir davantage: l'idée d'un tirage au sort exceptionnel (conditions de participation mentionnées sur le bulletin encarté entre les pages 16 et 17) proposé aux nouveaux abonnés et aux réabonnés serait capable de soutenir ma démarche.

Valeurs de l’art : La proposition de Juan Cook nous a séduits. D'un commun accord, l'équipe de rédaction a décidé de reproduire ci-dessus ce diptyque intitulé "La liberté de la presse, source de vie".

      Lors d'un cours avec un élève dans son atelier               Lors d'une visite chez Alexis Hinsberger